Il y a quelques temps, nous avions eu l’occasion d’assister au set de Flechette au Social Club : groupe montant du milieu trap music, les deux producteurs et leur MC qui le composent ont déjà livré quelques perles comme Bones, The Belly Dance ou dernièrement un remix officiel de Madonna. Des morceaux à la composition fine, bien calibrée et surtout à l’esprit oriental bien marqué. Une bouffée d’air frais dans le trap qui prouve que le genre a encore beaucoup à donner.
En plus de leur set à venir ce soir aux côtés de Flosstradamus et Tropkillaz, rien que ça, ce fut donc le moment idéal pour EDM France de partir à leur encontre et de discuter un peu avec ce trio fort sympathique et à l’expérience très intéressante.
Quel est votre parcours musical ? Est-ce que vous pouvez vous présenter pour ceux qui ne connaissent pas ?
Dylou : Notre parcours musical est plus basé sur la musique acoustique. Avec mon frère, on a commencé avec un parcours Jazz au début puis on s’est détourné vers la musique électronique.
Josh : Vu la façon dont la musique a évolué, c’était assez logique. On a bien aimé les trucs chelous et originaux qui se passaient dans l’univers trap, avec des instrus improbables… C’est une chose que les gens n’avaient pas entendu. Ça nous a apporté le côté percussif, parce qu’on est dans le hip hop à la base, on faisait de la batterie et des percussions. C’est vraiment un bon mélange et, à force, on s’y est mis en se disant qu’on pouvait tout faire sur ordinateur maintenant, tout maison !
Tana : Je viens de Londres mais j’ai rencontré Josh quand il vivait là-bas. Quand il devait repartir à Paris, nous avons commencé à travailler ensemble sur ce projet qui s’appelait Flechette. Je suis là pour porter encore plus la fête et je suis MC pour la nuit. Je suis là vraiment pour le live set mais pas pour la production… Je laisse ça au professionnel. (rires)
Il a quelque chose que nous trouvons super intéressant dans Flechette, c’est cette vraie personnalité. Il y a une touche orientale qui est unique dans le milieu Trap Music. D’où vous vient-elle, elle fait que vos sons sont vraiment caractéristiques ?
Josh : Avant le projet Flechette, on se voyait très régulièrement avec mon frère pour faire des prods Hip Hop. Le Hip Hop c’est du sample, du coup, on partait toujours de samples… et ce qui nous fait vibrer, ce sont les samples un peu ethniques, d’Afrique du Sud, d’Afrique noire, d’Inde. On prenait juste pleins de samples de différentes origines ethniques et on faisait des beats avec. On a gardé cet esprit, celui de garder la vibe organique, plutôt que de mettre juste des synthés, des synthés et encore des synthés… Il faut essayer de garder cet esprit dans cette musique qu’est le trap.
Comment s’est faite cette collaboration avec des artistes du milieu trap tels que, entre autres, Tomsize ou Simeon ?
Josh : Quand on a commencé, j’étais encore à Londres. Je faisais des sons et bossais avec Hucci, Ozzie, Stooki Sound, Charlie Traplin… Tous les anglais. J’ai donc commencé là-bas, avant que le trap soit vraiment à Paris. J’ai vu que personne ne faisait ça ici : quand je suis rentré, on a fait ça plus concrètement avec mon frère, et c’est à ce moment que tout une scène s’est débloquée. Il y avait Tomsize, qui faisait des sons et qui commençait à m’en envoyer, et on fait une première collab’ ensemble. Puis avec Simeon, qui travaillait beaucoup avec Tomsize, puis tous les quatre… On a fait des soirées ensemble, on a rencontré des organisateurs qui voulaient faire du son avec nous, qui nous organisait des soirées… Ils ont fini par créer leur label, Unborn Records. Et tant qu’à faire, quitte à sortir une track, étant donné que l’on n’a pas envie de s’occuper de l’aspect gestionnaire… Ce sont des potes, on a confiance en eux, alors on sort des musiques sur leur label.
Ca fait donc combien de temps que vous êtes sur le label Unborn Records ?
Josh : On est très proche des artistes qui s’occupent de ce label, et depuis le début on travaille avec eux… mais on n’est pas sur le label à proprement parler.
Dylou : On est quand-même très indépendant dans ce qu’on fait… Mais Unborn Records reste proche de nous. Ils sont assez gros, français… Ça va vraiment être un label qui va prendre… de ouf.
De vos yeux de producteurs, comment voyez-vous aujourd’hui le genre trap et son évolution ?
Dylou : Il y a énormément de producteurs, et c’est une bonne chose. Ça crée encore plus de matière sonore, de nouveaux styles… Il y a beaucoup de genres qui se déclinés : ça fait du bien à la fois à la musique électronique, et ça fait aussi du bien au Hip-Hop car c’est une musique qui ne va jamais mourir. Elle ne fait que se développer et récupérer de l’inspiration de partout… Mais il y a aussi beaucoup de choses qui ne sont pas biens.
Lesquelles ?
Dylou : Il y a beaucoup de gens qui découvrent le trap. Ils préfèrent le trap assez basique, avec des morceaux sortis il y a deux ou trois ans, parce que c’est très facile d’accès, très reconnaissable car très simple…
Est-ce que le fait d’avoir des tubes à la radio – prenons par exemple les tracks de Dillon Francis & DJ Snake, ce sont celles qui s’apparentent le plus à du trap – et l’effet mainstream qui les accompagne vous effraient ?
Josh : Non, au contraire ! Si les radios commencent à en passer et que les gens en écoutent de plus en plus, car les goûts des gens sont très influencés par ce qui passe sur les ondes, c’est qu’il y a un futur encore plus gros que ce que l’on pouvait imaginer à la base, en se disant que le trap était une niche underground. En fin de compte, il y a un potentiel peut-être plus gros que juste un style à part comme fut le dubstep, ou le moomba… Je pense que l’on a affaire à une ouverture vachement plus large, où il n’y a plus forcément un tempo à respecter, un instrument à avoir… Il y a une grosse liberté dans le style qui fait que les options peuvent s’ouvrir à la radio et au mainstream beaucoup plus facilement. On va se retrouver avec des trucs à la radio que tout le monde écoutera et dont on n’aurait même pensé que ça aurait pu être de la musique il y a dix ans… Je pense que dans le futur, ça peut donner des trucs super biens.
Dans le milieu trap, les producteurs sortent souvent leurs tracks au compte-goutte, il y assez peu d’albums ou d’EP. Pour Flechette, pouvons-nous nous attendre à un projet de ce style ?
Tana : C’est différent, car nous ne sommes pas encore de gros, gros artistes encore. Pour sortir un album, ce n’est pas possible. Mais un EP, avec quelques chansons… Je ne sais pas, pour le futur peut-être.
Josh : Au tout début, on a sorti un EP sur Cream Collective, qui était le label formé avec Hucci et Ozzie. On s’est rendu compte que les auditeurs écoutaient beaucoup la première track, un peu moins la deuxième, le troisième encore un peu moins… En fait, ils préfèrent avoir un morceau qu’ils aiment, et s’ils tombent sur d’autres morceaux du même artiste, ils vont se dire « okay, je vais aller découvrir ce mec », mais ils préfèrent avoir des chansons sans vraiment savoir « qui fait ça ». Et c’est comme ça que l’on essaye de se faire connaître : en sortant des morceaux un par un, ça atteint un nombre de personnes plus large.
Donc il n’y pas d’EP de prévu pour Flechette…
Josh : Non, il n’y en a pas de prévu.
Vous faîtes aussi partie du groupe De La Bass, qui est composé de vous, Tomsize et Simeon. Il y a un potentiel de fou quand-même ! Comment ça va se passer dans un avenir proche pour De La Bass ?
Josh : On est pris en charge par quelqu’un qui nous a signé sur ce projet. On a des choses qui arrivent : un clip, pas mal de morceaux en stock… On sort cependant les sons au compte-goutte, car avec chacun nos projets personnels, il faut que l’on prenne le temps de se retrouver. On ne peut pas travailler à deux alors qu’on est quatre : c’est plus difficile, car l’un ne va pas être d’accord sur une chose, l’autre sur une autre… Il faut que tout le monde soit d’accord. C’est pour cela qu’après, le résultat est plus complet, quitte à ce que cela prenne des mois pour faire une track. Mais là, on en a de côté, on va voir comment les sortir de manière très professionnelle.
Justement, ça ne doit pas être facile de se retrouver quand l’un part à l’autre bout du monde jouer, ainsi que l’autre… On pense par exemple à Tomsize qui a eu récemment son visa pour jouer aux Etats-Unis : vous et l’international, que pouvez-vous nous en dire ? Où peut-on vous voir prochainement ?
Josh : On est plus tourné sur l’Europe pour le moment. Les Visa, c’est vraiment l’usine à gaz. Puis surtout, quand on a des soirées qui se proposent aux Etats-Unis par exemple, c’est au compte-goutte. Du coup, c’est difficile d’organiser un tour : on se gère nous-même, on n’a pas d’agent, de tourneur ou quoique ce soit, et il faut qu’on arrive à gérer les Visa, qu’on s’organise nous-même avec les promoteurs de là-bas pour faire correspondre les différentes dates entre-elles, etc.. Forcément, une date, au niveau du budget, ce n’est pas possible, donc on attend juste d’avoir plusieurs dates qui s’enchaînent les unes après les autres dans une même période de temps. Mais ça va se faire à un moment.
Selon vous, personnellement… quelle est la meilleure ville d’Europe pour vivre le trap ?
Tous : Paris !
Paris, vraiment ?
Josh : Ouais, on est bien à Paris ! Peut-être parce que c’est nous, et que c’est bonne ambiance… Mais ils sont assez chauds sur le trap ici.
Même par rapport à une ville comme Londres, qui accueille de très gros producteurs du milieu ?
Tana : Londres ? Il n’y a pas de trap. C’est surtout du hip-hop, du underground, de la bass music, de la house, mais le trap, c’était… très éphémère.
Que dans Paris, donc. C’est cool.
Tana : Oui. Enfin, en Europe particulièrement, mais l’Angleterre est beaucoup plus…
Josh : L’Angleterre, c’est pas vraiment l’Europe. C’est une autre monde un peu !
Pour terminer : pouvez-vous nous dire une chose exclusive, n’importe laquelle, un scoop, une anecdote minime, quelque chose que vous n’ayez encore jamais dite à personne ?
(longue hésitation) Josh : On va sortir un remix officiel dans quelques jours, quelque chose de très gros.
Tana : J’ai écouté la track, et ça va vraiment être énorme. (Il s’agissait en fait du fameux remix de Madonna !)
On devrait donc entendre parler de Flechette très prochainement. Leur remix de Bitch I’m Madonna s’est vite classé dans les vingt vidéos les plus populaires de YouTube : un joli succès qui, on espère, se réitérera pour les deux frères producteurs.
ƒlechette
Soundclound | Facebook | Twitter