Parmi les nombreux festivals français, rares sont ceux qui peuvent se targuer d’être à la fois un vecteur musical, culturel et humanitaire puissant au point d’attirer plusieurs centaines de milliers de personnes. Parmi les quelques élus, on peut citer sans mal les Solidays, l’un des points centraux d’Île-de-France du mois de juin. On revient sur une vingtième édition gorgée de mélanine et de bonnes ondes, en plein milieu du gigantesque hippodrome de Longchamp.
Depuis sa première édition en 1999, le festival Solidays n’a cesse de promouvoir la scène musicale actuelle pour une cause des plus humaines : la lutte contre le SIDA. Les bénéfices étant reversés à des associations de lutte contre la maladie, occasionnant des artistes qui aiment s’engager de façon caritative et à des prix réduits voire inexistants, chaque contribution est la bienvenue. Une excellente façon pour les festivaliers de s’amuser tout en prenant part au combat, et autant dire qu’il y a de quoi faire puisque le célèbre Hippodrome de Longchamp, qui accueille aussi la version parisienne du Lollapalooza, est un lieu splendide pour s’adonner à ce genre d’activités. Trois jours intenses et variés !
UNE SCÈNE ÉLECTRONIQUE PÊCHUE
En tant que média de musique électronique, notre premier intérêt résidait bien évidemment dans le panel de DJ’s proposé par le festival parisien. Et force est de constater que l’événement s’en sort très bien avec une petite ribambelle d’artistes quali’, pour une part composée de superstars de l’EDM et, de l’autre, de créatifs plus indépendants, plus précis et plus underground. Le vendredi accueillait notamment DJ Snake, certainement l’homme le plus en vue de la sphère actuelle : après avoir rempli Paris-Bercy en février, le Français a su délivrer toute sa puissance musicale sur la main stage, non pas sans quelques réserves. Comme souvent lorsqu’il doit s’adresser au plus grand nombre, le serpent a moins tendance à s’orienter dans la Bass de ses débuts, au profit de hits plus commerciaux et de son style tapant récemment abordé dans des tracks comme Let’s Get Ill ou Gassed Up.
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Qu’à cela ne tienne, il s’agissait néanmoins de l’un des sets les plus bruts du festival, arborant tout un tas de sons épicés piochant dans le Trap et le Dubstep qu’on aime tant. Impossible, toutefois, de ne pas remarquer encore et toujours ces similitudes scéniques au fil des années : bien qu’il soit un incroyable showman, DJ Snake se cantonne toujours à faire du DJ Snake, se limitant aux mêmes phrases, aux mêmes motivations de foule, aux mêmes revendications. Les néophytes seront comblés tandis que les fidèles habitués commenceront, peut-être, à se lasser de ses plus grosses prestations, tournant alors la tête vers ses shows en club, plus musclés.
La sacrée bonne surprise, une heure après DJ Snake, fut assurément Mr. Oizo. Aussi connu pour être un réalisateur cinématographique bien, bien barré sous son vrai nom Quentin Dupieux, on pouvait penser que le Français offrirait une prestation à l’image de sa discographie et filmographie : étrange, originale et complètement loufoque. Et s’il y avait effectivement de ça, le DJ n’a pas hésité à balancer de vraies musiques énervées, essentiellement Trap ou Jersey Club, parsemé de grands classiques. On a ainsi eu droit à l’anthologie Underground Anthem de Flosstradamus, ou Harder Better Faster Stronger des Daft Punk. Un régal !
Sacrée bonne surprise de la part de Mr. Oizo aux Solidays, beaucoup plus énervé qu'il n'y parait ! Avez-vous un artiste, vous aussi, qui vous a pris aux tripes ? ✊
Publiée par EDM France sur Samedi 30 juin 2018
Impossible de ne pas mentionner David Guetta, survenu le samedi, toujours aussi à l’aise avec le mainstream et les grandes populations, non pas sans quelques pointes plus acides toujours bienvenues. Une belle occasion de jouer son dernier hit Like I Do ou son grand classique indémodable Love Don’t Let Me Go !
Puis, le grand Mura Masa a livré une prestation des plus personnelles et autant dire que ses sons Lotus Eater ou Hell ont eu l’effet escompté, au milieu de musiques Future Beats et Hip-Hop plus sages mais néanmoins délicieuses. Il y avait également toute une scène Techno finement sélectionnée dont faisait partie Bambounou – cocorico ! – et la brute Rebeka Warrior. Une facette plus sombre du festival, survenant la nuit et satisfaisant les différents fêtards plus téméraires. Enfin, mention spéciale au grand maître Arnaud Rebotini et sa House mélodique – fidèle à son style précieux – à Møme et son électro-pop gracieuse, à Chinese Man, au prodige FKJ qui est à voir absolument, à la chill-attitude sans précédent de Polo & Pan et, surtout, à Meute et son concept troubadour toujours aussi saisissant. Ces gars savent vraiment y faire.
POP, ROCK, RAP : LA GRANDE AURA DES SOLIDAYS
Les Solidays sont également un excellent moyen de s’adonner à de très nombreux artistes en tout genre, faisant partie souvent de la crème actuelle de leur style personnel. Un an après leur passage au Lollapalooza Paris, le trio IAM est revenu et s’avère toujours aussi efficace ; les très à la mode BigFlo & Oli ont prouvé que l’audience leur appartenait toujours (on ne peut que féliciter cette fidélisation du public incroyable) ; Hamza et sa mélancolie Trap/R’n’B ou le très bon Nekfeu, que l’on ne présente plus.
Une scène Rap de qualité qui allait de pair avec une partie Pop-Rock, elle aussi foisonnante avec la venue de Shakaponk. Encore une fois, le groupe français n’a pas de retenue et dispose d’une énergie communicative impressionnante. Un vrai spectacle ! De même, la désormais célèbre Jain a enflammé la foule comme il se devait : il faut dire que son hit Makeba, d’ailleurs chanté en plein milieu de la foule dans une gigantesque bulle, a de quoi être retenu !
UN LIEU PAISIBLE ET VISUEL
L’autre grande force des Solidays est bien celle de disposer de l’Hippodrome de Longchamp, largement pris d’assaut par l’ensemble des différentes scènes. Avec de gigantesques tentes déployées, une main-stage gargantuesque et des scènes un peu partout, parfois dédiées à des genres plus rétro, le site est un véritable lieu de verdure enchanteur. Les organisateurs ont bien fait d’installer des activités un peu partout – dont certaines expositions préventives contre le SIDA – ainsi que des attractions visuelles du plus bel effet. De même, les scénographies, sans être des plus audacieuses, ont bénéficié d’un soin particulier avec de nombreux effets lumineux et atmosphériques.
Pas de grand reproche à faire au système-son non plus, qui semble avoir bénéficié de meilleurs réglages par rapport aux années précédentes où certaines balances n’avaient pas forcément convaincu. Le seul vrai point faible du festival réside vraiment en son réseau téléphonique, malheureusement ultra-saturé et qui ne donne pas le droit à l’erreur. Autrement dit : ne perdez pas vos accompagnateurs, car les messages comme les appels ont de grandes chances de ne pas passer. Sans ça, ce vingtième anniversaire est indéniablement une réussite, comblant les moins assidus comme les plus noctambules et couvrant l’ensemble du spectre musical français. On espère qu’à l’avenir, la direction artistique intégrera davantage de DJ’s, quitte à s’aventurer dans l’audace avec le Pardon My French ou, pourquoi pas, la Bass Music. Rendez-vous l’année prochaine !